Published by ANNE DENIAU aka ANN RAY

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Je traquais les traces de solitude aujourd'hui. Parce qu'il m'a fallu toutes ces années - stupid girl - pour réaliser ce que je prétends ne pas savoir, pour comprendre profondément, viscéralement la solitude, la grande solitude, celle dont parle Rilke. Celle qui est inhérente à notre condition. Celle qui ne s'affranchit d'aucun accompagnement. Celle qui participe de l'essence de l'être. Cela ne me rend ni triste ni gaie. Simplement, je me rends. Peut-être à l'évidence. Enfin, je me rends. Et à mon grand étonnement, je me demande si je n'en retire pas une forme de soulagement, quelque chose qui me rend plus dense et plus légère. Ou peut-être, quelque chose qui me rend à moi-même. Tout est clair, subitement. Toute la palette des solitudes humaines, juxtaposées, pour quelle fresque, finalement ?

 

Je traquais les traces de solitude aujourd'hui. Une rose sur le buste d'une femme, une rose improbable dans une grisaille supposée, posée là comme un papillon irréel, une tâche rouge ni sanglante ni violente, une rose éclairée, éclairante. Ecarlate. Attirante. Le gant bleu d'un homme âgé qui semblait fatigué de tout et n'aller nulle part - avec autorité pourtant, une forme de but dans l'errance peut-être -,  un gant solitaire, une main qui faisait la tête à l'autre, si j'ose dire, une main réchauffée pour une main glacée, une forme d'équilibre en soi, peut-être, deux mains immobiles posées là, magistrales, l'une bleu myosotis et l'autre couleur chair, ensemble et séparées. A quelles fins ?... Enfin une main bleue, vaguement dérangeante. Inquiétante. Et puis la boutique jaune, celle que je regarde depuis longtemps, la boutique mystérieuse, personne n'y entre et personne n'en sort jamais, pourtant quelqu'un, quelque un, un, y habite, puisqu'elle est repeinte, régulièrement, quand le jaune s'éteint il s'illumine à nouveau, un jaune bouton d'or éternellement revisité, semblable et différent, unique. La boutique jaune. Clignotante. Envoûtante.

 

Je traquais les traces de solitude aujourd'hui. Et cette floraison de fragments de solitude, cette réunion de couleurs primaires comme nous, comme tous et chacun, me donnait envie de délirer, doucement, de me rendre à la douce absurdité de l'existence, comme on penche tranquillement la tête en signe d'assentiment, comme on assemble en toute fantaisie et en pure inutilité les pièces d'un puzzle dont on sait par avance qu'elles ne correspondent pas, mais qu'elles pourraient, qu'elles auraient pu, d'une manière ou d'une autre, correspondre. Je l'ai écrit ailleurs : ce qui est formidable quand on écrit des histoires, c'est que l'histoire se passe exactement comme on le souhaite.

 

Doux délires. Trois couleurs, primaires. Trois couleurs séparées, distinctes, solitaires, les couleurs originelles, celles dont tout découle, celles qui associées contiennent la possibilité de toutes les autres. Trois couleurs associées depuis la nuit des temps, et pourtant séparées. Une rose écarlate, une main gantée de bleu myosotis, une boutique bouton d'or. Doux délires, doux mélanges, doux mensonges.


Voici leur histoire :

 

 

LA VICTIME :


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LE PSYCHOKILLER :


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LE LIEU DU CRIME :


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Je vous laisse continuer l'histoire...


Anyway. Je connais la fin, mais je peux vous laisser imaginer la vôtre... C'est comme vous voulez.


STOP.


ou :


THE END : Quelques pas plus loin, j'ai rencontré l'inconnu solitaire. Il était beau, mais beau ! Une beauté d'ange, d'archange ou d'étranger, bref suffisamment beau pour que je m'arrête, pour que je sorte de ma solitude savamment protégée, barricadée même - sortir les mains des poches, enlever les écouteurs, déposer les lunettes noires-, et que je me mette dans cette belle lumière insensée, sous ce ciel d'orage, à sourire. Quatre yeux qui se regardent, fixement, bien en face, ça fait beaucoup d'effet, une sensation multicolore. "Bonjour", "Bonjour". "Je peux vous photographier ?"...  "C'est pour vous ?" "Oui, enfin... Ne vous inquiétez pas. C'est votre reflet qui m'intéresse. Non, votre ombre. Enfin, les deux.". Il a souri. Sans doute parce que nous savions tous les deux ce qu'il était en train de faire. Il ensevelissait la fin. Il effaçait les traces, pour en inventer de nouvelles. Sur son visage, des yeux très clairs, bleu ancholie. A ses pieds, une multitude de couleurs, il en a choisi une, c'était du rose. Il a levé le bras en direction d'un point précis, plusieurs fois, comme on vise ou on tire ou on photographie. Un beau geste, tranchant. Il effaçait les traces, certes, mais pour commencer, il repeignait avec une conviction remarquable la vie en rose. Ni ange ni complice, au final. Un homme seul déterminé. Volontaire. Sublimement beau. Avec pour seul discours la couleur rose.

 

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